Vous êtes professeur des écoles ou professeur du secondaire et l’idée de vous reconvertir fait peu à peu son chemin. Vous hésitez néanmoins à prendre une décision radicale et à quitter définitivement l’Éducation nationale avant d’avoir mûri votre projet. Vous préférez ne pas lâcher la proie pour l’ombre et voulez vous donner le temps de la réflexion ? Demander un cumul d’activités dans l’Éducation nationale peut s’avérer une solution de transition adaptée dans le cadre d’une reconversion. Faisons le point sur cette possibilité offerte aux enseignants, qu’ils soient fonctionnaires ou contractuels, à temps partiel comme à temps plein.

 

Demander un cumul d’activités dans le cadre d’une reconversion : avantages et inconvénients

Si vous êtes encore au début de votre projet de reconversion, la démission pure et simple ou la rupture conventionnelle vous paraissent peut-être prématurées. Et la disponibilité, qui permet de garder son statut de fonctionnaire, mais pas son traitement, n’est pas toujours possible financièrement. Le cumul d’activités peut alors présenter des avantages indéniables :

  • stabilité et sécurité des revenus ;
  • garantie de garder son emploi en cas d’échec du projet envisagé ;
  • transition en douceur entre deux univers professionnels ;
  • maintien d’un lien social en cas de création solitaire de son autoentreprise.

Il faut cependant être conscient des risques possibles :

  • difficulté de tout mener de front ;
  • possibilité de surmenage, voire de burnout ;
  • dispersion risquant de retarder l’aboutissement du projet, voire de le compromettre.

Vous vous sentez néanmoins prêt à relever le défi ? Lisez la suite pour comprendre dans quel cadre un agent public peut cumuler son emploi avec une ou plusieurs autres activités.

 

Comment le cumul d’activités est-il encadré dans la Fonction publique ?

L’article L121-3 du Code général de la fonction publique (anciennement article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983) est clair : « Le fonctionnaire consacre l’intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées. » Il est donc interdit, en principe, à tout agent public, qu’il soit fonctionnaire ou contractuel, de cumuler un emploi à temps complet avec un autre emploi. Cette règle de base comporte néanmoins des exceptions et les articles 123-2 à 123-8 précisent le régime de dérogations applicable, strictement encadré et limitatif.

 

Les activités pouvant s’exercer librement

  • gestion du patrimoine personnel et familial ;
  • production des œuvres de l’esprit (créations littéraires, photographiques…) ;
  • exercice des professions libérales qui découlent de la nature des fonctions exercées.

Les dérogations à l’interdiction de cumul faisant l’objet d’une déclaration

  • exercice d’une activité privée en qualité de dirigeant pendant deux ans au maximum pour les agents lauréats d’un concours ou recrutés comme contractuels ;
  • exercice d’une activité lucrative pour les agents à temps incomplet (quotité inférieure ou égale à 70 % imposée par l’employeur, contrairement au temps partiel, choisi par l’agent).

Les dérogations requérant une demande d’autorisation

  • exercice d’une activité à titre accessoire pour tout agent à temps complet ou à temps partiel ;
  • sollicitation d’un temps partiel pour création ou reprise d’une entreprise.

Quelles sont les démarches à effectuer pour obtenir une autorisation de cumul d’activités ?

Premier réflexe : consulter la circulaire de votre académie d’exercice

C’est en général entre les mois de janvier et de juin que paraît la circulaire académique sur les cumuls d’activités. Il est indispensable d’en prendre connaissance : y sont décrites en effet toutes les formalités à accomplir. Si la loi ne prévoit pas de calendrier imposé, il est recommandé d’effectuer sa demande avant le début de mouvement pour la prochaine année scolaire, en particulier quand il s’agit d’une demande de temps partiel. Toutes les demandes sont à renouveler chaque année scolaire et à tout moment en cas de changement dans les conditions d’exercice ou de rémunération.

 

Qu’est-ce qu’une « activité accessoire » ?

Parmi les dérogations nécessitant une autorisation, la modalité de cumul la plus intéressante est l’exercice d’une activité dite « accessoire ». Pourquoi ? Parce qu’elle peut s’exercer aussi bien à temps complet qu’à temps partiel et qu’elle ne comporte pas de limite dans le temps. A contrario, il est impératif de solliciter un temps partiel pour création ou reprise d’entreprise lorsque l’activité envisagée n’est pas considérée comme accessoire. Et cette autorisation est valable 3 ans maximum, renouvelable un an. Quatre ans, ce n’est certes déjà pas si mal pour évaluer la viabilité de son projet ! Mais il serait compréhensible de vouloir se donner plus de temps… Il faut alors se plonger dans la lecture de la liste limitative des activités accessoires autorisées à l’article 11 du décret du 30 janvier 2020. Expertise et consultation, enseignement et formation, activité à caractère sportif et culturel, vente de biens produits par l’agent, les rubriques peuvent concerner un grand nombre de professeurs.

 

En cas de doute…

La loi étant relativement récente, le sujet est soumis à de nombreuses interprétations. En cas de doute, il est possible de saisir le référent déontologue de son académie et/ou le collège de déontologie. Cette instance, créée en application de la loi de déontologie de 2016, est habilitée à donner un avis sur la compatibilité du projet de tout agent avec ses droits et obligations. La lecture de ses avis peut aussi se révéler instructive.

On y apprendra que « guide de randonnée » est bien une activité accessoire au titre des activités à caractère sportif et culturel, contrairement à « projectionniste de cinéma ». On découvrira aussi que développer une activité d’écrivain public ne peut pas être considéré comme relevant d’une « production d’œuvres de l’esprit » au titre de l’article L 112-2 du Code de la propriété intellectuelle. Dans ce cas, il est bien nécessaire de solliciter un temps partiel pour création d’entreprise. Tout manquement à la réglementation sur le cumul d’activités pouvant entraîner des sanctions disciplinaires, voire pénales et le reversement des sommes perçues indûment, il ne faut pas hésiter à se montrer prudent. Ne pas hésiter non plus à faire preuve de bon sens. Toute activité qui conduirait à doubler le revenu et/ou le temps de travail ne saurait être considérée comme accessoire !

 

Que faire en cas de refus de votre cumul d’activités dans l’Éducation nationale ?

Les motifs de refus

Les demandes d’autorisation de cumuls sont adressées par la voie hiérarchique.

C’est le supérieur direct -IEN dans le premier degré, chef d’établissement dans le second- qui donne un avis à l’autorité chargée d’arrêter la décision : DASEN ou recteur.

Celui-ci peut refuser le cumul d’activités :

  • si l’intérêt du service le justifie ;
  • si les informations communiquées sont inexactes ;
  • si le cumul est incompatible au regard des obligations déontologiques.

À noter : les motifs donnés sont parfois contradictoires d’un agent à l’autre. Un chef d’établissement considérera que le volume horaire consacré à votre activité risque de nuire à la bonne réalisation de vos missions si vous êtes déjà à temps plein. Un autre estimera au contraire, qu’ayant refusé d’effectuer des heures supplémentaires, vous n’êtes pas légitime dans votre demande de cumul. Ce dernier motif de refus est d’ailleurs de plus en plus fréquent dans un contexte de pénurie d’enseignants.

Enfin, il faut savoir que certains cumuls, liés à la fonction d’enseignement, sont plus facilement accordés : vacations dans le supérieur, rédaction d’ouvrages parascolaires, cours particuliers par exemple. On peut le comprendre : favoriser la création de microentreprises, dans le cadre de reconversions, n’est pas forcément la priorité de l’administration.

 

Les recours en cas de refus de votre demande de cumul d’activités

Même si l’autorité hiérarchique directe a toute latitude pour émettre un avis défavorable, elle doit mentionner un motif. En cas de désaccord, le recours gracieux, voire contentieux est possible. Avant d’en arriver là, dialoguer avec son supérieur peut s’avérer une stratégie payante. L’argumentation ne doit pas être négligée. On pourra par exemple poser cette question : vaut-il mieux un agent très occupé, mais épanoui et développant ses compétences, ou un agent aigri d’être contraint de fonctionner ? Il convient donc de rester combatif même en cas de premier refus. Et pourquoi pas voir cet obstacle momentané comme une occasion de tester son mindset d’entrepreneur ?

Le cumul d’activités est une solution intéressante pour le fonctionnaire de l’Éducation nationale désireux d’explorer d’autres horizons sans prendre trop de risques. La démarche comporte néanmoins de possibles écueils. Si vous vous décidez à suivre ce parcours, voilà quel pourrait être le triptyque gagnant pour sortir victorieux des arcanes administratifs : connaissance des textes, dialogue et accompagnement !

 

Béatrice Barennes

 

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